Le Grand Siècle. L'Europe de 1598 à 1715.
Fayard, 1972, in-8°, 290 pp, traduit de l'anglais, 64 pl. de gravures hors texte, 6 cartes, biblio, index, cart. éditeur, jaquette, bon état (Coll. L'Aventure des civilisations)
"Il est bien connu que les historiens français, même universitaires, ne lisent pas beaucoup les historiens étrangers, surtout quand ces derniers ont le front de s'occuper de la France. Les historiens étrangers adoptent habituellement l'attitude inverse, qui les honore. Est-ce pour rapprocher les premiers des seconds que la vénérable collection jaune de chez Fayard présente tant d'œuvres traduites dans sa série "l'Aventure des civilisations" ? Traduites surtout de l'anglais, choix heureux, puisque l'école, ou plutôt les écoles historiques anglaises persistent à rester, quoi qu'on prétende, les meilleures. Après l'éclatante et presque insolente " Ère des révolutions " d'Éric Hobsbawn, typique d'une certaine "gauche" britannique, voici "le Grand Siècle" de Maurice Ashley, le livre de la sérénité et de l'indépendance. Un ouvrage bref, sobre, qui ne tonne, ni ne claironne, ni ne prêche ; le reflet d'une lecture et d'une culture d'une vaste et noble discrétion, naturellement internationales l'une et l'autre ; pourtant, une vision personnelle, plus suggérée que proclamée ; des vérités avancées plus qu'assenées ; des sourires toujours de bonne compagnie ; un souci constant et une honnêteté rare pour rétablir les perspectives les plus justes, les plus européennes, et explorer tous les domaines, la philosophie comme la si matérielle démographie populaire ; presque aucun de ces tics habituels aux Anglais (qui connaissent bien les nôtres), même pas cette manie de vouloir à tout prix soutenir une "thèse", habituellement retentissante autant qu'absurde ; rien qu'un léger antipapisme, en fin de compte salutaire..." (Pierre Goubert, Le Monde, 15 mars 1973) — "La traduction élégante du « Grand Siècle » de Maurice Ashley permettra au lecteur français de se familiariser avec une œuvre d'un charme un peu désuet en dépit de la vigueur d'une synthèse difficile et intelligemment surmontée. Le Grand Siècle, pour Ashley, est littéralement le siècle de la grandeur, symbolisée par Versailles et la gloire du Roi-Soleil. (...) Ce que l'auteur admire le plus, c'est ce que cette civilisation condamne : la liberté d'esprit, mais les auteurs ne s'expriment qu'avec réticence, la tolérance religieuse, mais celle-ci ne triomphe qu'exceptionnellement. Et pourtant à ne regarder que la floraison de savants, de poètes, d'artistes, qui ne consentirait à voir dans ce siècle de guerres et de révolutions un nouvel Age d'Or ? C'est que l'histoire ici se situe sur les sommets, ne concerne guère que les élites, tandis que les peuples « accaparés par l'interminable lutte pour la vie » ne représentent que chair à canon indispensable au prince et producteurs économiques, étrangers aux progrès de la civilisation. Et tant pis si pour eux le siècle est un âge de fer. On ne s'étonnera donc pas que la guerre et les relations diplomatiques occupent une place primordiale dans un livre consacré aux États et au « concept historique » d'Europe beaucoup plus qu'aux sociétés." (Guy Chaussinand-Nogaret, Annales ESC, 1974)